Clic clac c’est dans la boîte
Seulement chaque année elle revient. Chaque année on appréhende, chaque année on hésite, et chaque année on craque. Pour quoi ? Pour la photo de classe bien sûr ! Et là, c’est l’inflation… Première trouvaille des vendeurs de clichés, la photo grimace. Certes on la trouve rigolote, mais on préfère quand même celle où ils sont sérieux… du coup on prend les deux (oui je suis faible).
Deuxième trouvaille découverte une année de maternelle de Maximoy, la photo individuelle… pas individuelle. On regroupe 4 enfants de la même taille, et on shoote ! Comme ça, le photographe est sûr d’en vendre, il en prend moins, en moins de temps, et moins de travail derrière. Economie d’échelle, efficience, une véritable industrie…
En revanche, quand photo individuelle il y a, on oublie l’innovation. Les mêmes sourires forcés, les mêmes bouches édentées, et surtout les mêmes fonds qu’autrefois… Pourquoi ? Pourquoi nous obliger à subir cette éternelle couleur délavée passée à la truelle ? Parfois une touche de fantaisie nous inflige une nuée de gros pois multicolores, annihilant ainsi tout effort vestimentaire préparé la veille avec soin.
Alors pour rendre la tâche plus agréable à tout le monde, mesdames, messieurs les photographes scolaires, petit conseil : les machins en carton que vous nous mettez dans la pochette ne servent à rien. Alors pourquoi ne pas investir dans un fond vert, en lieu et place des horreurs que vous vous trimballez? Vous pourriez proposer une couleur neutre adaptée à la tenue de l’enfant, voire une fantaisie totalement assumée (dinosaures, fonds marins, espace, Oui-Oui ou la Reine des Neiges, tout devient envisageable tant que ce n’est pas imposé).
Parce qu’on ne va pas se mentir, même si la couleur jure totalement avec la déco du salon, même s’il n’est pas resté coiffé comme il était parti le matin, même si le sourire est raté, même si on dispose d’un appareil de pointe dans son smartphone, on va l’acheter, comme chaque année. Ou alors il faut être drôlement fort pour résister…
Premier test pour savoir si vous serez apte ou non à la résistance : les photos de maternité. Avouons-le, les premiers jours de vie de bébé ne leur confèreraient pas la couverture de Vogue. Tête déformée, yeux boursouflés et jaunis par le collyre, nez un peu gonflé, oreille pliée, on est objectivement loin du bébé Guigoz… Sauf que je pense que l’objectivité part avec le placenta. A partir du moment où l’on pose nos yeux sur lui, notre bébé est le plus beau du monde.
Une aubaine pour une poignée d’entreprises qui exploitent ce filon inépuisable : l’amour des jeunes mères. Le photographe arrive dans votre chambre, les valises pleines de compliments pour votre merveille, et c’est parti pour la première séance de flatterie. Les images seront forcément parfaites avec un bébé si parfait. 10 minutes plus tard, il s’en va déjà répéter ses gammes chez la voisine, les images conventionnelles dans la boîte.
Un mois plus tard, lorsque la commerciale refait surface vous êtes tellement submergée par le quotidien d’un nourrisson à la maison que vous aviez totalement oublié. Entre temps, vous avez donné 240 tétées, changé au moins autant de couches, et dormi… mieux vaut ne pas compter. Ajoutons à cela la chute d’hormones qui nous guette, on ne peut pas dire que le moment soit bien choisi pour une âpre négociation. Pur hasard? Pas si sûr…
La voilà donc chez vous, avec un lot de photos qui vous rappelle tant de bons souvenirs. Bébé a déjà tellement changé… En mieux, certes, mais il a tellement changé… En noir et blanc, en couleurs, en sépia; en livre, sous verre ou sur toile, les images s’enchaînent et vous remarquez à peine que c’est toujours les mêmes. Sans le vouloir, votre taux d’ocytocine grimpe, vous êtes sur le point de craquer, et la vendeuse le sait.
C’est là que votre capacité de résistance entre en jeu. Les fêtes approchent? Quelle chance ils ont un pack Noël. Ils en auront un autre pour la St Valentin, Pâques ou la fête des mères, une offre à ne pas rater ! Le tout pour la somme modique de… gloups, plusieurs centaines d’euros ! Oui mais vous pouvez payer en plusieurs fois. Revenons sur terre, cela signifie quand même payer des photos à crédit !
Mais comme on craque toutes, quelques conseils pour ne pas (trop) se faire avoir :
– Pour le prix du pack, vous pouvez vous offrir un appareil photo, et prendre toutes les photos que vous voudrez. Pensez-y en cadeau de naissance.
– Dès que le photographe est passé, on sort sa propre artillerie et on prend les mêmes 😉
– Si vous n’êtes pas prête, il peut attendre ou repasser. Le temps d’un brush express, d’une touche de maquillage, vous serez parfaite !
– Attention à la bretelle de soutien-gorge d’allaitement, cette large bande blanche qui dépasse bien souvent et que vous risquez de détester d’ici quelques années à force de la voir au mur. Alors on sort de sa valise un petit top à bretelles blanches ou à manches longues, et le tour est joué.
– Ils vont jeter les livres, les tableaux, et alors? Ce sont eux qui perdront de l’argent, pas vous. Et justement, comme les produits sont déjà réalisés, sachez que tout est négociable, même à l’unité. Ils ne vont pas s’asseoir sur une vente…
– N’achetez que les photos, et scannez-les (ou prenez-les en photo). Vous pourrez mettre en page et commander votre livre. Cela vous reviendra forcément moins cher, et vous pourrez rajouter vos propres clichés.
– Si vous hésitez entre le noir et blanc et la couleur, optez pour la couleur. Vous pourrez passer vous-même en noir et blanc ou en sépia, tandis que le choix inverse est irréversible.
Les occasions de vous faire payer les images de vos bambins seront nombreuses. Et je ne parle pas des photos avec le Père Noël ou Mickey, des calendriers de fin d’année, celles sur la plage ou les pistes de ski. Soyons forts face à tous ces prétextes à sortir le chéquier !