Papa à temps partiel
Quand le couple se délite, lorsque malgré tous les efforts (lire ici et ici) la flamme s’est éteinte entre un Papa et une Maman, lorsque les yeux s’ouvrent sur une relation qui n’est pas celle que l’on osait espérer, lorsque le bonheur prend finalement les traits d’une autre personne, parfois il n’est d’autre solution que celle de la séparation.
Une séparation synonyme de deuil de cette entité à deux que l’on croyait indestructible, de deuil de cette infinie affection, de ces beaux souvenirs qui vont petit à petit laisser place aux regrets. Une séparation surtout synonyme de souffrance, pour tout le monde. Pour les membres du couple déchiré, et pour ce (ou ces) petit(s) être(s) qui croyait Papa et Maman inséparables, qui croyait que le noyau de son existence était incassable.
Rarement le choix du Papa
On peut chercher toutes les solutions du monde, tenter à tout prix de préserver son enfant de toutes ces histoires d’adultes, mais quelle que soit la formule adoptée, il y aura toujours une partie de la famille qui se retrouvera isolée. Soit une semaine sur deux, soit plus longtemps. Et souvent, cette partie de la famille prend le nom de Papa.
Pour des raisons biologiques peut-être, pour des raisons sociétales surtout. Parce que dans la tête et le coeur des « gens », alors que le père doit subvenir aux besoins de l’ensemble du foyer, une mère et son enfant sont liés in-utero. Que ce lien est indéfectible, et qu’il serait invraisemblable de le briser. Parce que la société a même réussi à en convaincre tous ces pères qui pensent sincèrement que leur enfant serait bien mieux avec sa maman.
Et si ce n’était pas le cas ? Et si ce papa s’était levé autant que sa conjointe lors de nuits difficiles, de poussées dentaires ou de loups cachés sous le lit ? S’il avait changé autant voire plus de couches ? S’il savait donner un bain ou reconnaître un érythème fessier ?
Bref, si Papa était aussi bon que Maman pour s’occuper de leur enfant, et s’il était meilleur ?
Même dans ce cas, il suffirait généralement que la femme demande la garde pour qu’elle l’obtienne. Et que l’homme devienne un papa… à temps partiel. Une semaine, un week-end, ou un mois de vacances (en cas de déménagement) sur deux.
Un Papa relégué à l’attente
Et du jour au lendemain, ce Papa qui connaissait jusqu’à la couleur des couverts Ikea à ne surtout pas mettre, le goût de dentifrice à éviter et la façon de tartiner le Nutella se retrouve à devoir redécouvrir un petit être à chaque week-end de retrouvailles. Et il s’en passe des choses, en deux semaines. Une dent peut tomber, les petites roulettes peuvent être rangées, le meilleur copain peut avoir changé… En deux semaines, des révolutions vont se réaliser : un petit homme va avoir réussi à se laver tout seul, à apprendre sa première poésie, à colorier sans dépasser, à connaître les couleurs en anglais… Tous ces progrès dont on s’émerveille jour après jour, mais que ce papa pourrait même ne pas remarquer, parce que ça passe vite, un week-end.
Pendant ce temps-là, lui regarde ce petit lit vide, celui où il a préparé sa couette avec ses personnages préférés, sans savoir qu’ils sont déjà passés aux oubliettes, remplacés par la nouvelle mode. Il regarde la caisse de jouets qui attendent patiemment d’être invités dans une nouvelle aventure enfantine, à moins que les goûts aient changé depuis… Il regarde son placard plein de coquillettes. Il sait que son fils aime ça, et il ne veut pas se battre. Il préfère optimiser les moments partagés, parce que ça passe vite, un week-end.
Pendant ce temps-là, on plaint la maman qui se retrouve toute seule pour élever sa progéniture. Elle est seule chaque jour, avec un ou plusieurs enfants. Et c’est vrai, c’est dur d’être seul, vraiment très dur. Mais elle est aussi la seule à obtenir les câlins du soir ou les bisous à la sortie de l’école. Elle est la seule à voir des sourires et des bras se lever lorsqu’elle ouvre la porte de cette petite chambre chaque matin. De son côté, lui est vraiment seul. Sa réserve d’amour se remplit en attendant impatiemment son tour, et il sait qu’il n’arrivera pas à la vider. Parce que ça passe vite, un week-end.
Une solitude qui fait mal
Si certains papas se contentent de cette parentalité à temps partiel, d’autres la vivent en souffrance. Une souffrance muette qui aimerait crier que cela ne suffit pas. Que la pension alimentaire ne compense pas les heures passées à distance. Certains papas donneraient tout pour assister aux réunions avec la maîtresse, pour accompagner les sorties scolaires, pour emmener leur enfant chez le pédiatre. Pour toutes ces petites choses du quotidien qui font le lien. Et pas besoin d’avoir été attachés par un cordon pour cela.
Et ces papas ont peur. Peur du temps qui passe. Peur du lien qui s’effrite. Peur des activités qui diminueront encore plus le temps passé ensemble. Peur du jour où leur week-end sera devenu un poids pour l’enfant qui n’en sera plus un.
Parce que des super papas, ça existe aussi (et pas que ceux qui coupent du bois dans une petite maison de prairie), et je leur dédie ces quelques lignes.
Je vous invite à lire les mots timides et poignants d’ 1 Papa tout seul. Il débute dans le « blogging », mais quelque chose me dit qu’on devrait entendre parler de lui…
Moins de 3% des litiges de gardes d’enfants sont en défaveur des pères.
Il ne « suffit » pas non que la mère demande la garde pour l’avoir. Si ça se passe comme ça la plupart du temps, c’est que c’est une volonté commune.
malheureusement plusieurs exemples autour de moi ont démontré certains dysfonctionnements de la justice familiale…